Introduction
La Russie a une longue et riche tradition dans le domaine de la poupée. Amulette, poupée rituelle, jouet ou objet patriotique, son rôle est multiple (voir Les poupées folkloriques etc. Partie I : poupées traditionnelles russes, américaines et japonaises). Suite à la chute du mur de Berlin et à l’effondrement de l’Union Soviétique, la Russie connaît au début des années 1990 une explosion de la poupée d’artiste, comme les États-Unis à la même période (voir Créatrices et créateurs américains). Le cas de la Russie s’explique, selon les directrices du salon international “Art et poupées”, Yuliana Taranova et Svetlana Pchelnikova, par le fait que “la culture russe est naturellement très créative. Notre culture produit traditionnellement des objets artisanaux faits à la main. De plus, au moment où les gens peuvent consacrer plus de temps à leurs hobbies -vous n’avez plus besoin de travailler jour et nuit comme à l’époque de l’URSS-, ils peuvent se tourner vers la créativité et les œuvres d’art, en l’occurrence les poupées. Tous ces stéréotypes selon lesquels les poupées ne sont que des jouets pour enfants sont balayés par les artistes russes contemporains. Les poupées en Russie sont de véritables œuvres d’art, et chacune a une histoire unique racontée par son créateur”. Cette dernière affirmation rejoint, un siècle plus tard, le credo du mouvement des poupées d’art de Munich (voir Les artistes en poupées pionniers).
Et créatifs, les artistes russes en poupées contemporains le sont assurément ! On assiste à un véritable foisonnement imaginatif explorant toute la gamme des expressions et sentiments humains : beauté, étrangeté, nostalgie, merveilleux, douceur, burlesque, mélancolie, humour, bonhomie, tristesse et (particulièrement, pourrait-on dire) onirisme. En transformant l’anatomie humaine en personnage inanimé captivant et magique, ces artistes s’approprient le savoir-faire ancestral et y introduisent des idées, techniques et matériaux modernes pour créer des œuvres d’art excentriques et hyperréalistes non orthodoxes et curieuses à observer. Les deux pôles de cette renaissance sont, sans surprise, Moscou et Saint-Petersbourg, capitales culturelles de la Russie éternelle. Nous présentons ici un tour d’horizon de la création contemporaine en poupées d’art de ce pays, qui compte un grand nombre d’artistes de premier plan.
Sélection d’artistes russes contemporains
Michael Zajkov
À tout seigneur tout honneur, ce premier portrait est consacré à Michael Zajkov, le jeune surdoué dont les poupées hyperréalistes déchaînent les commentaires dithyrambiques sur la Toile (curieusement, cet artiste très présent sur les réseaux sociaux n’a pas de site web, peut-être parce que la plupart de ses œuvres ne sont pas à vendre). Vivement recommandé par la célèbre artiste en poupées italienne Laura Scattolini (voir Créatrices et créateurs contemporains), une de ses inspiratrices avec Rotraut Schrott (voir Les artistes en poupées pionniers), il sort licencié de l’université de Kouban (Russie) en 2009, avec une spécialisation en sculpture. De 2010 à 2013, il poursuit ses études en 2e et 3e cycles tout en travaillant comme sculpteur pour un théâtre de marionnettes. Il fabrique sa première poupée en 2010, et présente pour la première fois son travail au 4e salon international de poupées d’art à Moscou en 2013, où il fait sensation et attire l’attention des collectionneurs et des galeristes (photos, de gauche à droite : Anastasia, Antonina,Nina).
Michael Zajkov crée avec une grande précision des poupées si réalistes que malgré leur beauté formelle le public les reçoit parfois avec un certain malaise, ce qui amuse leur auteur. Il travaille différents types d’argile polymère, avec une prédilection pour le Fimo et le Cernit. Ses poupées sont dotées de 13 articulations mobiles, ce qui leur confère une grande posabilité. Les visages, y compris les yeux en verre venus d’Allemagne, sont soigneusement peints à la main par l’artiste, les perruques étant en mohair français de qualité élevée. Les costumes élégants semblent tout droit sortis du début du 20e siècle, avec leurs précieuses matières : batiste, voile, soie et dentelle française ancienne. Les bottes en cuir sont habilement confectionnées par l’artiste.
Les sœurs Popovy
Tout aussi jeunes et douées que Michael Zajkov, les sœurs Popovy sont artistes en poupées et stylistes de mode. En associant ces deux passions, elles lancent de petites collections conceptuelles de 10 à 15 poupées par an. Les jumelles Ekaterina et Elena, nées et élevées à Perm (Russie), commencent à fabriquer des poupées en 2004, suite à un projet au département de stylisme de l’académie d’art architectural de l’Oural où elles ont la consigne de créer une des poupées exprimant des émotions. Leurs portraits ont des sources d’inspiration multiples : personnalités, musique, cinéma, histoire de la mode, nature,…la liste est sans fin. Chacune de leurs BJD (voir Les poupées BJD) originales (OOAK), complexes et superbes, est faite à la main de A à Z (photos).
Un énorme travail est au cœur de chaque collection. Le concept est développé à partir d’une idée ou d’une émotion, avant le travail préparatoire : documentation sur le récit accompagnant le concept, recherche d’images, identification des tissus, choix des techniques et dessin des esquisses. Le style des sœurs Popovy se base sur l’opposition entre beauté et effroi, fascination et répulsion : elles exploitent les imperfections des visages humains pour les sublimer. Elles accordent beaucoup d’importance à la photographie de leurs créations, qu’elles ont développée pour en faire des œuvres à part entière (photos).
Le processus de création fait la part belle aux croquis de la future poupée, à la fabrication entièrement manuelle du prototype, peint et mis à la teinte au moyen de pinceaux et de pistolets, et à la fabrication des costumes et des perruques avec des tissus rares anciens. Chaque poupée reçoit comme autographe un petit papillon peint à la main et un tatouage en forme de machette blanche.
Les sœurs Popovy, qualifiées de nouvelle vague de l’art russe en poupées, ont déjà reçu de nombreux prix, dont celui de meilleur créateur de poupées du salon international de poupées de Moscou.
Kardenchiki
Sous le pseudonyme de Kardenchiki se cache un phénomène de la création russe contemporaine en poupées d’artiste, le couple de créateurs Karina Burkatskaya et Denis Shmatov, originaire de Saint-Pétersbourg. Leurs personnages inclassables sont habités par un souffle épique et semblent échappés de grands romans ou de contes populaires, comme cette petite fille au regard triste qui évoque Cosette (photo de gauche ci-dessous), ou ce tableau assurément inspiré par Alice au pays des merveilles (photo de droite ci-dessous).
© Kardenchiki © Kardenchiki
Comme les œuvres de leur compatriote Michael Zajkov, ces poupées sont issues de l’imagination fertile d’artistes surdoués et sont très difficiles à trouver sur le marché, tant les collectionneurs se les arrachent. La première rencontre de Karina et Denis avec les poupées d’art remonte à 2013, à l’occasion de visites répétées sur internet. Ils sont tellement impressionnés qu’ils décident de créer leurs propres poupées. L’étude des matériaux et des techniques de fabrication, la familiarisation avec le travail d’artistes célèbres et l’immersion progressive dans leur univers leur prend de longues semaines. À l’instar de tous leurs confrères autodidactes, ils réalisent quelques premières poupées au cours d’un processus fastidieux d’essais et erreurs, particulièrement en ce qui concerne la peinture et le respect des contraintes anatomiques, et finissent par développer leur style personnel.
Au cours de leur apprentissage, Karina et Denis essaient de nombreux matériaux, dont le papier mâché et un plastique auto-durcissant qu’ils adoptent en raison de leur facilité de traitement et de cuisson. Particularité à noter, ils ne travaillent pas à partir de croquis, et refusent donc les ouvrages sur commande. Chaque année la physionomie de leurs poupées évolue, ce dont ils ne se rendent compte qu’en comparant les photographies des modèles récents avec celles des modèles antérieurs.
Karina et Denis prennent le parti d’être à l’écoute de leurs personnages en cours de réalisation, comme s’ils étaient vivants, les laissant suggérer leur couleur de cheveux, leur coiffure et leur costume. Certaines poupées se révèlent ainsi capricieuses, leur style est difficile à définir, il s’avère nécessaire de reprendre des vêtements sur mesure et des coiffures, en s’aidant de nombreuses photographies à chaque étape de la fabrication. En revanche, d’autres se montrent très coopératives, elles acceptent toutes les propositions des artistes et leur image se forme avec fluidité.
“La plupart des collectionneurs affirment trouver une âme, une personnalité et une histoire dans nos poupées, elles n’occupent pas seulement une place sur une étagère mais aussi dans leur cœur, elles deviennent des amies, des compagnes”, déclarent Karina et Denis, “ce qui arrive de plus merveilleux, c’est lorsque le collectionneur ressent la poupée aussi bien que nous, c’est pourquoi il est très important pour nous de connaître le futur lieu d’habitation de nos poupées, car elles emportent avec elles une part de notre âme”.
Karina et Denis sont inspirés par tout ce qui les entoure et remplit leurs vies : musiques, films, peintures, sculptures, l’architecture de leur magnifique ville de Saint-Pétersbourg, les gens dans la rue, surtout les enfants avec leurs mimiques et leurs émotions sincères. La photographie joue un rôle important, elle développe une vision spéciale du monde et un désir de beauté. Toutes ces sources d’inspiration engendrent une atmosphère créative et une humeur dans leur maison, là où naissent les poupées. Enfin, il convient de ne pas oublier l’apport des expositions : Karina et Denis présentent régulièrement leurs œuvres en Russie, Estonie, Lettonie et République Tchèque.
Gageons que le monde de la poupée n’a pas fini d’entendre parler de Kardenchiki. Ci-dessous, trois créations récentes à tête en La Doll, bras et jambes en Flumo, corps en tissu bourré de sciure de bois et vêtements et chaussures non détachables.
© Kardenchiki © Kardenchiki © Kardenchiki
Tatiana Baeva
Dans un style plus classique, la grande dame de la création russe de poupées, Tatiana Baeva, œuvre dans le domaine des “sculptures habillées”, comme elle les appelle, depuis 1982. Diplômée de l’école des Beaux-Arts de Moscou avec une spécialité en restauration d’icônes et peinture à l’huile, elle travaille comme artiste indépendante dans divers domaines tels qu’illustration ou projets de télévision. Pendant son temps libre, elle s’intéresse au matelassage et à la fabrication de poupées.
Sa première série de poupées d’art, concept nouveau en Russie à l’époque, date de 1982. Elle les expose dans différents salons d’art à Moscou. Elle se met alors à explorer divers styles et matériaux en autodidacte, car il n’y a à l’époque ni cours ni fournitures dans ce domaine, avant de trouver sa voie et de se consacrer entièrement à la création de poupées originales (OOAK) en porcelaine ou en technique mixte au début des années 1990. En 1992, elle gagne un 2e prix avec une poupée en tissu à la convention de la société internationale de poupées en Allemagne.
Tatiana Baeva confie : “j’admire la diversité des formes et visages humains, aussi mes poupées reflètent-t-elles un mélange de diverses cultures et traces ethniques (photos).
Je suis fascinée par le processus d’animation d’un morceau d’argile, bien que ce soit la partie la plus demandeuse en temps et en énergie de chaque projet. La peinture est également passionnante, car c’est là que l’apparence et -plus important- l’âme de chaque poupée sont créées”.
L’objectif de Tatiana est d’exprimer le caractère de la poupée à travers la posture et le regard. Elle utilise différents styles et techniques de peinture pour transmettre l’humeur qu’elle essaie d’atteindre. La réalisation des costumes est la deuxième étape pour compléter l’apparence. Elle traite et teinte souvent des tissus, et utilise des accessoires anciens, en appréciant comment les textures et les couleurs paraissent s’accorder de manière magique pour compléter le processus de création. Mais, comme elle le précise : “le costume a une signification secondaire et ne sert qu’à révéler le caractère de la poupée ; si je fais par exemple une japonaise, je ne l’habille pas en kimono traditionnel, ce qui rend la grille de lecture de mes poupées plus complexe. Parfois j’en entends des interprétations auxquelles je n’avais pas pensé.”
Tatiana Baeva réalise parfois des collections de poupées, comme celle consacrée aux villes. Écoutons-la : “la poupée de New-York a été une découverte capitale pour moi en termes d’approche artistique ; je conduisais dans cette ville lorsque soudain j’en “vis” une image, qui finit par devenir un type habillé en blanc avec une vue urbaine panoramique dessinée sur ses vêtements, un plan de métro sur sa chemise et un chapeau cylindrique reproduisant des bâtiments de la ville (photo de gauche). La poupée de Moscou a beaucoup de fenêtres sur son costume ; depuis mon enfance je suis stupéfiée par le nombre de fenêtres ouvertes à Moscou ! j’imaginais toujours des histoires qui pouvaient se passer derrière ces fenêtres (photo de droite). La poupée de Saint-Pétersbourg (photo du centre) est un homme jouant du violoncelle et portant un pardessus qui représente une vraie carte de Léningrad (ancien nom de Saint-Pétersbourg). Dans cette collection, je me suis concentrée sur mes propres associations d’idées plutôt que respecter une vérité historique.”
Les poupées de Tatiana font partie de nombreuses collections privées à travers le Monde, dont celle de l’actrice américaine Demi Moore. Elle est directrice de l’association des artistes en poupées de l’alliance des artistes de Moscou, et membre du NIADA (National Institute of American Doll Artists). Elle aime à répéter : “aussi loin que je me souvienne, j’ai aimé dessiner, coller, sculpter, et par dessus tout fabriquer des objets ressemblant à des poupées. Une fois, à l’école, j’ai dit que plus tard je voudrais travailler dans une usine de poupées à peindre le visage et les yeux.”
Dima
Dima, nom d’artiste de Dmitry Petrovich Zhurilkin, est un jeune créateur russe de poupées, diplômé de l’école d’art et d’artisanat de Moscou. Spécialiste de la technique mixte (approche picturale ou sculpturale, figurative ou abstraite, par laquelle l’artiste utilise au moins deux médiums différents, comme le dessin, la peinture, la sculpture,…), il réalise depuis 1995 des sculptures ou des poupées qu’il appelle “objets”, ce qui lui laisse une large étendue de créativité.
Son univers est fantasque, caricatural, burlesque, cocasse, parfois absurde, et s’inspire de personnages de fiction ou historiques (ci-dessous, de gauche à droite : Napoléon Bonaparte, la princesse au petit pois, le joker) .
Les corps sont disproportionnés, la tête hypertrophiée, les codes de l’esthétique sont cassés. Toutefois, l’air bonhomme des visages des poupées attire la sympathie et fait sourire. Ce qui frappe par ailleurs, c’est l’imagination et l’originalité des situations, comme cette poupée en équilibre (photo de gauche) ou ce pêcheur qui visiblement n’attrape pas de poisson (photo de droite).
Dima utilise des matériaux aussi divers que pâte à modeler, papier-mâché, métal, perles de verre, et bien entendu les tissus des vêtements qu’il fabrique lui-même. Sa peinture de prédilection est l’aquarelle. Les œuvres de Dima sont présentes dans des collections privées en Russie, aux États-Unis, en Suisse, en Italie,…Le créateur des “poupées sans les poupées”, selon son expression, a participé à de nombreux salons spécialisés et remporté plusieurs prix internationaux.
Sasha Alexandra Khudyakova
Revenons au classique avec la très talentueuse Sasha Alexandra Khudyakova, artiste moscovite héritière de la tradition russe en fabrication de poupées. Ses impressionnantes créations éthérées, d’une grande beauté formelle et costumées de manière élaborée et détaillée, attirent l’attention et retiennent le regard. Frôlant la perfection dans le style classique, non dénuées d’une certaine sensualité et d’une délicate féminité, leur réalisme anthropomorphique a été baptisé par leur auteure “subsculpture” (photos).
Sasha Khudyakova est diplômée de l’université d’État arts et industrie Stroganov à Moscou. Artiste en poupées professionnelle depuis 1992, elle travaille aussi bien la porcelaine que les argiles polymères Cernit, Fimo, Flumo, et le plastique. Sans cesse, elle s’efforce d’exploiter des idées, techniques et matériaux innovants. Sa statuette en porcelaine métallique “la lune” (photo) a été sélectionnée “œuvre d’art du jour” par le salon Art Expo New-York de 2011 ; elle utilise la porcelaine métallisée pour créer une figurine élégante et fine, décorée de guirlandes et d’anneaux en argent, qui évoque la lointaine délicatesse du clair de lune.
Présidente de l’association russe des artistes en poupées, Sasha est également vice-présidente de la section poupées d’art de l’union internationale des artistes de Russie et membre de l’union des artistes de Moscou. Ses créations sont détenues dans de nombreuses collections privées en Allemagne, Pays-Bas, Israël et Italie, ainsi que dans le Musée de l’Histoire de Moscou.
Ima Naroditskaya
Oniriques et décalées, gaies tout en étant paisibles, les poupées originales (OOAK) en paperclay d’Ima Naroditskaya sont inclassables. Parfois aériennes, toujours émouvantes, elles forment un mélange étonnant d’imagerie sincère et d’ironie, à la fois lyriques et comiques, et dégagent une poésie certaine. L’une des principales artistes russes contemporaines en poupées, également célèbre à l’étranger, l’imaginative Ima, née à Moscou, dessine depuis son enfance et rêve d’être styliste. Malgré ou peut-être à cause de cela, elle embrasse la “sérieuse” profession d’ingénieur en construction ferroviaire après l’obtention de son diplôme en 1986. Au cours de cette première vie, elle réussit en 1990 un concours pour une formation en animation graphique, à la suite de laquelle elle intègre pendant six ans le célèbre studio d’Alexander Tatarsky comme animatrice graphiste. Cette expérience lui fait ressentir la merveilleuse sensation d’insuffler la vie à des objets inanimés. Plus tard, en visitant un salon de poupées pour la première fois, elle est si captivée qu’elle décide de suivre en 1996 un master class en fabrication de poupées avec Tatiana Baeva (voir ci-dessus) et devient professionnelle en 1997.
“Mes poupées s’inspirent de personnages de cinéma ou de littérature, de la musique, de la nature, d’impressions de voyage ou de mes amis et relations”, confie-t-elle. “J’essaie en langage des poupées de refléter mes pensées, impressions et comportements en réaction à ce qui m’entoure. Je trouve aussi l’inspiration dans les travaux d’artistes aussi divers que Michel-Ange, Rembrandt, Vermeer, Turner, Degas, Bernini et Klimt, pour ne citer qu’eux.” Les photos ci-dessous illustrent la variété d’inspirations d’Ima Naroditskaya. De gauche à droite : papillon, la reine des oiseaux, le chemin.
NIADA archives NIADA archives NIADA archives
Elle participe à de nombreuses expositions et remporte des prix en Russie, aux États-Unis, en Allemagne et au Japon, dont le prestigieux “Mega-Star” du salon international de poupées de Moscou en 2006. En 2000, elle devient membre de l’union des artistes de Moscou et en 2001 elle est élue au NIADA (National Institute of American Doll Artists). Ses œuvres sont présentes dans de nombreuses collections privées à travers le Monde.
Alexandra Koukinova
Alexandra Koukinova est l’artiste principale et la fondatrice en 1989 à Moscou de la société “Alexandra”, qui fabrique et commercialise des poupées d’artiste en porcelaine raffinées, destinées à la collection et au souvenir. Ces poupées présentent une haute fiabilité historique, et offrent de grandes maîtrise et qualité d’exécution. Elle sont produites en exemplaire unique (OOAK), en édition limitée de 3 à 35 pièces ou en série de 150 pour les poupées souvenir. Depuis la fondation de la société, plus de 100 modèles de poupées en porcelaine, mais aussi en tissu ou en argile, ont vu le jour (photos, de gauche à droite : Beatriche, tissu ; Tess, argile ; Nelly, porcelaine).
Elle est diplômée de l’école studio du théâtre d’art dramatique académique Tchékov de Moscou avec une spécialisation en conception de décors et de costumes, école où elle développe sa passion pour le design et l’antiquité. Frustrée par les limites de délai et de budget imposées par les compagnies de théâtre, elle commence à concevoir des poupées en tissu qui rappellent le passé et portent des costumes russes provinciaux traditionnels. Lorsqu’elle fonde la société “Alexandra”, c’est avec l’idée de perpétuer la mémoire menacée de ces costumes au moyen des poupées, avec le concours de l’expertise de trois importants musées moscovites : le musée d’histoire, le musée d’artisanat décoratif et le musée d’art populaire.
Alexandra conçoit et réalise les moules de tous ses modèles de poupées, la porcelaine étant cuite et peinte sous sa supervision à l’usine de Moscou. Tous les vêtements sont cousus et brodés à la main par une équipe locale de couturières, en utilisant des étoffes et dentelles anciennes, et décorés de perles, pierres fines et fleurs en soie. Les chaussures, perruques, bijoux et accessoires sont faits à la main par des artisans de la société. Les premières poupées en porcelaine sont introduites en 1995 dans la fameuse “collection russe” (photos, de gauche à droite : Alisa, Arina, Michail).
Outre des costumes traditionnels russes, l’inspiration d’Alexandra Koukinova vient de l’art déco, du ballet, de la commedia dell’arte, de personnages historiques et de contes de fées. En 1993, les produits de la société “Alexandra” reçoivent la mention officielle du gouvernement “œuvres hautement artistiques”, qui donne accès aux archives de tous les musées russes. La société participe aux plus importants salons de poupées en Russie, en Europe et aux États-Unis, et remporte de nombreux prix : “Mega-Star”, “grâce et harmonie”, “meilleure poupée traditionnelle de l’année”, “prix de la sympathie du public”, “poupée d’excellence”, “pièce la plus attrayante” et “poupée de l’année”. Ci-dessous, de gauche à droite : Denise, Ondine, Tatyana.
Marina Bychkova
Dès l’âge de six ans, Marina Bychkova trouve sa voie : elle fera de belles poupées articulées. Son rêve devient réalité lorsqu’à l’âge de 24 ans en 2006 elle réalise, après s’être heurtée aux limitations de l’argile polymère, sa première BJD (voir Les poupées BJD) en porcelaine. Depuis, ses créations sensuelles au regard intense et aux lèvres pulpeuses, proposées nues, tatouées ou habillées fascinent le public (photos, de gauche à droite : vénitienne ; Anna Karénine survit au train ; Cendrillon nordique) .
Née en Sibérie en 1982, elle est inventive dès son plus jeune âge. À cinq ans, elle découpe des poupées de papier dans des livres ou des magazines. À six ans, elle dessine déjà des poupées et crée sa première poupée de papier articulée. Elle a son premier choc esthétique à l’âge de sept ans, à la vue d’une publicité télévisée pour Barbie. La même année, Marina fabrique des poupées organiques avec des fleurs, des brindilles et des feuilles, avant de commencer à coudre ses premières poupées en tissu. À neuf ans, la précoce fillette réalise une poupée en fibre en utilisant l’anneau de tétine de sa petite sœur comme tête et en défaisant une manche de pull pour faire des cheveux ! À partir de douze ans, elle vend à ses camarades d’école des poupées en papier dessinées et articulées. En 1996, sa famille s’installe au Canada, où l’inspiration pour ses poupées de papier passe des personnages de contes de fées et dessins animés russes à ceux de la culture et des films adolescents de l’Amérique du Nord.
Les tourments de l’adolescence et son exil mettent un terme à sa créativité jusqu’à ce qu’à l’âge de 20 ans, en première année à l’institut d’art et de design Emily Carr de Vancouver, elle découvre l’argile polymère et voie le film “Le seigneur des anneaux : la communauté de l’anneau”. Ces deux déclencheurs la conduisent à expérimenter la sculpture de poupées articulées en argile polymère. À 21 ans, elle découvre l’œuvre de l’illustrateur allemand Sulamith Wülfing qui va influer sur son style, et s’essaie à la broderie de perles. L’année suivante est importante pour Marina : elle fabrique ses deux premières poupées en porcelaine, avant de gagner avec elles un concours local qui la conduit à réaliser sa première poupée en porcelaine à articulations sphériques et à sérieusement envisager une carrière dans ce domaine. Un autre jalon dans sa vie : à 24 ans, pour son diplôme de l’école d’art, elle produit son premier travail conceptuel sur le thème de Blanche-neige, “Nécrophilie” (photos), exploration des perversions des contes de fées.
L’année suivante, elle crée la marque “Enchanted Dolls” (poupées enchantées), dont la déclaration de principe artistique précise : “ces poupées sont des œuvres d’art articulées élégamment sculptées. Remarquablement nue, gravée, ou parée de somptueux costumes sculpturaux faits de pierres, métaux précieux et objets trouvés rares, chaque poupée transmet de façon complexe un aspect de notre humanité. Uniques et délicates, leurs formes provoquent une forte réponse émotionnelle, et nous hantent par leur vulnérabilité. Tout à la fois innocentes et sexuelles, ces poupées dépeignent des images très stylisées de la féminité, en même temps qu’elles jettent le doute sur l’espiègle naïveté de la vie.” Marina apporte simultanément des transformations à son modèle : la taille de la poupée descend à 34 cm, avec un corps complètement articulé, et la mécanique interne est améliorée.
Côté technique, les poupées enchantées sont en porcelaine car cette matière offre trois avantages sur la résine : elle ne vieillit pas, étant résistante aux rayons UV, aux fluctuations de température, et imperméable ; la peinture du visage et du corps se lie à la porcelaine au niveau moléculaire durant la cuisson à haute température, ce qui lui permet de ne pas se détacher lors de manipulations et de résister à la lumière ; la porcelaine est bien plus dure et complètement résistante aux rayures. Par ailleurs, la plus grande fragilité de la porcelaine n’est pas avérée et dépend des conditions du choc.
La sculpture initiale est en Super Sculpey. À cette étape, tous les mécanismes d’articulation sphérique sont mis au point, finement réglés et grossièrement poncés. Une fois fait le premier jeu de moules, les formes sont coulées, cuites et poncées pour produire un ensemble lisse de parties du corps servant à réaliser le jeu final de moules. Puis vient le deuxième coulage, la création de logements pour les articulations et le perçage de trous pour le cordage. Les pièces sont ensuite cuites en allure minimale dans un four à céramique, puis nettoyées à fond pour obtenir un lustre élevé de la porcelaine. Vient alors la cuisson à grand feu, au cours de laquelle les pièces rétrécissent de 10 à 13 %. Puis arrive l’étape de la peinture : pour obtenir des couleurs riches, saturées et permanentes, elle doit être appliquée en plusieurs couches dont chacune doit être cuite, ce qui prend entre trois et cinq jours. Les articulations sont ensuite recouvertes de cuir pour assurer une bonne posabilité de la poupée. Le cordage emploie des cordes miniature robustes en acier ordinaire et s’effectue avec une tension distincte pour chaque articulation, de manière à rendre les mouvements des différents membres indépendants.
Après assemblage complet de la poupée, soit les cheveux sont collés, soit une perruque amovible est posée. L’étape finale est la réalisation du costume : Marina utilise de l’or 24 carats, de l’argent sterling, des cristaux d’Autriche, des perles graines plaquées d’or et des pierres précieuses telles que rubis ou émeraude pour orner en broderie les robes de ses poupées, ce qui lui prend entre 150 et 350 heures par robe.
Depuis 2004, l’année de ses premières poupées en porcelaine, Marina Bychkova est très exigeante et obsessionnelle dans son travail, et lui sacrifie tout. Son point de vue a le mérite d’être clair : un mode de vie équilibré est un mode de vie médiocre. Ceci vient du fait que, malgré sa jeunesse, Marina a un sens aigu de la mort et ne supporte pas de perdre un moment ou de laisser passer une occasion. Cela se traduit par un nombre impressionnant de réalisations, de publications commentant son travail, de salons où elle a exposé et de prix qu’elle a reçus, dont les prestigieux “poupée chef-d’œuvre” et “poupée de musée” du salon international de la poupée de Moscou, pour ne citer qu’eux.
Marina décrit son art comme essentiellement décoratif, figuratif et romantique. Ses poupées dévoilent une belle qualité un peu hantée, comme prises dans le versant obscur originel des contes de fées. Son travail conceptuel est influencé par des problématiques sociétales, psychanalytiques et féministes : ci-dessous, de gauche à droite, le combat contre le cancer du sein, les droits du fœtus, le syndrome de Stockholm dans “La belle et la bête”.
Cette vision claire de son art, associée à son talent et à une esthétique rigoureuse, confèrent à ses poupées la magie un peu dangereuse qui rend son œuvre unique. Laissons à Marina le mot de la fin : “la raison pour laquelle j’adore faire des poupées est la multidisciplinarité de cet art. Je ne me contente pas de travailler avec une seule technique telle que la peinture ou la sculpture, et les poupées m’offrent une expérience tactile variée et satisfaisante. Pour créer une poupée, je dois combiner sculpture, design industriel, peinture, gravure, fabrication de moules, dessin, ferronnerie, mode et bijouterie. Je veux tout ou rien !”
Anna Maryina
Dans un style différent, les poupées miniature d’Anna Maryina expriment la sensualité, la nostalgie et la mélancolie à travers des personnages variés allant de la fantasie à la mode, en passant par des figures russes traditionnelles et de sages jeunes mariées. Initialement passionnée par le vitrail, Anna vient aux poupées miniature en 2003 par le biais d’un kit de maison de poupées qu’elle achète à sa fille pour Noël : elle assemble la maison mais ne trouve pas de poupée pour l’habiter, aussi décide-t-elle de prendre des cours sur la porcelaine et de s’acheter un four afin d’apprendre à les fabriquer elle-même. Elle suit des ateliers avec Patricia Rose, Jack Johnston, Diane Keeler et Kyo Otake. Aujourd’hui Anna est devenue experte, mais la maison de poupée est toujours inachevée !
Elle a toujours été attirée par les poupées, mais en possédait très peu. Très jeune, elle dessine, découpe et habille ses propres poupées de papier. Née en Allemagne de l’Est de parent russes, elle voyage beaucoup car son père est militaire, elle ne s’attache à aucun endroit particulier et développe ainsi une forte imagination et une créativité certaine. De 1988 à 1993, elle étudie l’anglais à l’institut pédagogique de Petrozavodsk. En 1993, elle émigre à Duluth (Minnesota) dans le cadre d’un programme d’échange étudiant et s’installe aux États-Unis. En 2003, elle intègre l’université Bowling Green State de l’Ohio, où elle étudie la sculpture et la fabrication de moules. Elle vit maintenant en Pennsylvanie, où elle travaille comme agent immobilier et donne des cours de lecture, mathématiques et russe à de jeunes enfants. Parallèlement, elle mène avec succès une carrière de miniaturiste internationale en poupées à l’échelle 1/12e, d’abord sous le nom d’artiste Anna Hardman, puis sous celui d’Anna Maryina. Elle expose régulièrement au salon international Tom Bishop de Chicago, la plus grande foire mondiale de miniatures. Elle participe également à la grande exposition internationale “L’art de la poupée” de Moscou sur la place Rouge.
Sur le plan technique, la création de poupées à l’échelle 1/12e en porcelaine est un processus long et laborieux : la figurine est d’abord sculptée dans de l’argile polymère, puis un moule en plâtre est fabriqué et la porcelaine coulée dedans. Lorsqu’elle est cuite, la tête de la poupée mesure à peine 2 cm. Pour les costumes, Anna ne travaille qu’avec des matériaux naturels comme la soie, le coton, le cuir et la dentelle ancienne. Elle s’est essayée à fabriquer quelques BJD miniature (photo ci-dessous, “La fée bleue”), ce qui constitue selon ses dires un véritable défi.
Ses influences sont multiples : personnages de romans, de films, de peinture ou d’autres formes d’art. Sa poupée Katherine (photo de gauche ci-dessous) a été influencée par le livre éponyme de l’auteure de fictions historiques Anya Seton, biographie romancée de Katherine Swynford (1350-1403), troisième femme du prince anglais Jean de Gand, duc de Lancastre, et ascendante de la famille Beaufort et de l’actuelle souveraine du Royaume-Uni Élisabeth II. C’est aussi une admiratrice du peintre anglais John William Waterhouse, connu pour ses tableaux inspirés de la mythologie et de la littérature : sa sirène (photo du centre ci-dessous) est inspirée de celle du peintre (photo de droite ci-dessous).
Une autre de ses poupées, la princesse cygne (photo de gauche), est inspirée du tableau éponyme du peintre russe Mikhail Vrubel (photo de droite).
Anna rend hommage à des personnages de femmes brillantes, intelligentes et charismatiques, telles que la méchante reine de Blanche-Neige incarnée par Julia Roberts (“Mirror, mirror”, photo de gauche ci-dessous), la reine blanche d’Alice au pays des merveilles jouée par Anne Hataway , Khaleesi de “Game of thrones” (Le trône de fer) interprétée par Emilia Clarke, ou Padme Amidala (photo de droite ci-dessous), la femme politique de la prélogie de Star Wars incarnée par Natalie Portman.
C’est le charme féminin qui intéresse et attire Anna. Tout au long de sa carrière, elle a su créer des personnages qui incarnent cette féminité, des femmes comme elle le dit elle-même “inaccessibles, dépeignant l’amour, la romance, la fantaisie, un peu de tristesse et de sensualité.” Ci-dessous, de gauche à droite : Angelique, OOAK en porcelaine, 15 cm, 2017, dans une robe en soie, avec de vraies perles autour du cou et des cheveux en viscose ; Mademoiselle et son cochonnet sculpté portant des perles, porcelaine, 15 cm, 2015, dans une robe en soie brodée à la main ; Felicia, porcelaine, 14 cm, 2011, de la série des jeunes mariées.
Le travail d’Anna Maryina est couvert dans de nombreux articles de magazines spécialisés : Dollhouse and miniature scenes, Doll reader, Dollhouse miniatures, Dolls, Miniature collector, American miniaturist, Dollhouse world, AIM online miniature magazine. Elle a reçu de nombreuses récompenses, dont le prix d’excellence de l’industrie du magazine Dolls en 2018 pour sa poupée Rhiannon la déesse celte (photo ci-dessous), le prix d’excellence du public du même magazine en 2015 pour la poupée OOAK Camila, et le prix du public DOTY (Doll Of The Year) pour Katherine en 2011. En 2007, elle obtient le statut d’artisan de l’association IGMA (International Guild of Miniature Artisans).
Nataliya Lopusova-Tomskaya
Le style de Nataliya Lopusova-Tomskaya, inspiré par l’Art Nouveau, n’est semblable à aucun autre. Ses poupées en papier mâché aux poses expressives, reconnaissables au premier coup d’œil, dégagent une douceur infinie et rayonnent de l’intérieur. Personnages d’un autre monde et d’une autre époque, anges, elfes, gens de cirque, ballerines, musiciennes ou belles dames, ils sont délicats et bienveillants avec leurs observateurs qu’ils semblent prêts à écouter, sans se précipiter pour parler d’eux-mêmes (photos ci-dessous).
Nataliya entre dans le monde professionnel des poupées d’art par le biais du théâtre de marionnettes. À l’âge de 17 ans, elle étudie au théâtre central d’État de Moscou sous la direction de Sergey Obraztsov, l’homme qui a donné à la marionnette son statut artistique en URSS. Dans ses ateliers, elle fabrique des personnages souples et mobiles en papier mâché pour des représentations de théâtre de marionnettes. 40 ans plus tard, elle est une artiste en poupées confirmée, diplômée de la faculté d’arts appliqués à l’université d’État du textile de Moscou, membre de l’union des artistes moscovites, de l’association des artistes créatifs de Russie, et exposante à la célèbre galerie Elena Gromova.
Les techniques utilisées par Nataliya peuvent être présentées dans les trois grandes étapes de la fabrication : la sculpture, la peinture et l’habillage. Tout commence avec un cadre métallique progressivement recouvert d’un mélange de différentes qualités de papier. Pour le travail initial de la tête et du tronc, du papier journal et du papier kraft sont utilisés, tandis qu’un papier souple et homogène résistant à la saturation en colle est nécessaire pour le travail minutieux des traits du visage. Les paumes de main sont formées de couches multiples d’un papier brun-gris souple, et les doigts fins et forts d’un papier kraft mince. Les jambes et les pieds requièrent des couches de trois types de papier différents, avec une colle faite d’un mélange de pâte de farine cuite et de colle à bois. Pour la tête et les mains, le papier mâché est durci comme du bois et taillé en fines lamelles. Pour le ponçage, le papier de verre est découpé en bandes trempées dans l’eau chaude puis formées en fins rouleaux qui agissent comme de petites limes. L’effet recherché dans la sculpture du visage, le plus difficile à obtenir, est une expression souriante pleine de bonté et de gentillesse, provoquant des sentiments chaleureux chez l’observateur (photos ci-dessous). Comme le dit Nataliya, “la vie d’une poupée se concentre dans son visage, et la création d’une tête peut prendre des mois, voire des années, à revenir pour modifier un détail, millimètre par millimètre.”
La peinture débute par le mélange de peintures et de laques à l’huile avec de la poudre de maquillage. La laque renforce la protection des couleurs, tandis que la poudre supprime les reflets crées par la peinture. Les couches de ton chair et les détails délicats et précis du travail au pinceau sont le canevas sur lequel reposent les vêtements et les accessoires.
La création des costumes est sans doute l’étape la plus stimulante du travail de Nataliya. Elle compare les techniques de décoration et d'ornementation des stylistes à celles des peintres, des poètes et des musiciens. Cela commence par la sélection des tissus dans une couleur dominante, avec des valeurs différentes de teinte, d’éclat, de saturation et de texture. Elle est particulièrement attirée par les tissus anciens ou indiens embellis par des ornements. Une de ses techniques préférées consiste à teinter le tissu avec des peintures acryliques pour créer un dégradé de couleurs du clair au foncé. Elle combine souvent tissus armurés, décorations ornementales, broderies et appliqués sur un même vêtement (photos ci-dessous).
Nataliya produit en moyenne trois poupées en papier mâché par an. En 2005, un changement initié par la galeriste Elena Gromova permet un léger accroissement de cette production : l’artiste sculpte les têtes et les bras OOAK, et un porcelainier fabrique et coule les moules. Ces parties en porcelaine sont ensuite rattachées à des torses et jambes en papier mâché conçus individuellement. Sept poupées ont ainsi été produites en 2014.
Laissons à Nataliya le mot de la fin : “J’ai de la chance que les idées et les images me viennent facilement, comme un don. Combinées à diverses expériences, elles stimulent mon imagination. J’aime les petites tâches fastidieuses de la fabrication de poupées, spécialement celles associées au papier mâché. Et tandis que les étoffes et la conception de vêtements m’animent, j’entraîne toutes les nuances de couleurs vers une harmonieuse unité avec effort et émotion. Faire des poupées, c’est à parts égales de l’amour et du stress. Mes poupées me sont chères, je les travaille et les modifie jusqu’à en tomber amoureuse. Chacune est une créature vivante, pas un objet d’art. Je ne peux pas voir les choses autrement.” Ci-dessous, de gauche à droite : “Ballet marin”, “Poires”, “Lettre à l’ange gardien”.
Rafael Nuri
Yana Tsiarentsyeva, alias Rafael Nuri, est une artiste passionnée et ambitieuse. Et la passion de cette collectionneuse de BJD confine à l’obsession : “je suis inspirée par le désir de faire la meilleure poupée”, confie-t-elle, “j’ai une image dans la tête, et je veux absolument la retrouver dans mes mains. Mon désir est si fort que rien ne peut m’arrêter, mon rêve se réalise toujours. Les poupées sont ce que j’aime le plus au Monde”. Le fait est que les créations de Rafael sont fascinantes : dans la lignée de BJD d’artistes russes contemporaines (les sœurs Popovy, Marina Bychkova, Polina Myalovskaya, Natasha von Braun,…), elles expriment une grande féminité, avec quelque chose de fragile et d’étrange (photos ci-dessous).
© BiDoll © BiDoll
Née en Sibérie et élevée à Minsk (Biélorussie), Rafael Nuri vit aujourd’hui à Pittsburgh (Pennsylvanie). Passionnée de poupées depuis la petite enfance, elle est marquée par sa première Barbie, offerte par sa grand-mère à l’âge de 11 ans. Cependant, elle ne se contente pas de jouer avec elles : elle veut aussi en créer de ses propres mains. Elle les dessine, les découpe puis les conserve dans une grande boîte. Quand sa mère découvre cette boîte, elle décide de l’inscrire à une école d’art pour enfants.
Son éducation artistique est exceptionnellement longue : diplômée de l’école d’art N1 de Minsk (Hudozhestvennaja Shkola N 1), puis de l’école d’État Glebov des Beaux-Arts de Minsk, et licence de conception en médias virtuels de l’Académie d’État des Arts de Biélorussie. “J’ai eu toute l’éducation artistique possible”, estime-t-elle, “j’ai été très chanceuse en tant qu’étudiante, car j’ai eu les professeurs les plus talentueux, qui ont toujours cru en moi et partageaient toutes leurs connaissances”.
Cette formation artistique intensive permet à Rafael de devenir artiste en poupées. Mais, particularité intéressante, elle pense que la technique n’est pas la chose la plus importante. “La part la plus importante de la fabrication de poupées n’est pas la technique, mais de savoir quelle type de poupée vous faites et pourquoi”, explique-t-elle, “je rencontre souvent des artistes qui commencent à sculpter sans réfléchir à ce qu’ils font. Il y a plusieurs raisons à cela : ils sont impressionnés par les matériaux et n’ont pas confiance en eux. Je pense que cela n’est pas bon : les objets doivent être conçus avant d’être exécutés”. Rafael est persuadée que l’origine de toute création devrait procéder de ces deux décisions capitales : concevoir et définir. Elle poursuit : “l’artiste devrait d’abord comprendre ce qu’il ou elle crée et quels buts il ou elle s’efforce d’atteindre. La base de tout projet réussi est un objectif bien défini. Je définis d’abord le but de mon projet ou de ma ligne de produits et ensuite j’agis. Je pense sincèrement que les matériaux, le savoir-faire et les connaissances suivront !”.
En 2009, Rafael reçoit en cadeau de son mari une poupée Pullip modèle Chill. Elle consulte alors les forums Pullip et y découvre les BJD asiatiques. Elle achète sa première grande BJD en résine de 70 cm et commence à repeindre des visages. Malgré les difficultés rencontrées, elle arrive à ses fins grâce à sa persévérance et à sa détermination sans faille. Dès 2010, elle est autonome pour la peinture des visages, la réalisation des vêtements et celle des perruques. De plus, elle apprend à faire de bonnes photographies de son travail. Elle commence à prendre des commandes pour des peintures de visages venues du Monde entier et devient une artiste en personnalisation reconnue.
En tant que collectionneuse, Rafael s’intéresse aux BJD en porcelaine. Frustrée de ne pas trouver sur le marché la poupée idéale, elle décide en 2010 de créer sa propre poupée en autodidacte, tout en poursuivant ses commandes de peinture de visages. Il lui faut trois ans pour terminer son premier prototype, mais dès lors sa production rencontre le succès et elle vend ses poupées très cher. Elle aime se renouveler pour éviter l’ennui et a toujours trois ou quatre projets différents en cours.
Rafael fonde sa compagnie BiDoll en 2010, qui acquiert une réputation d’excellence pour la production de poupées en porcelaine. Le terme BiDoll a été choisi pour souligner la dualité de ses poupées : “Envy” possède deux visages, celui d’une jeune fille endormie et celui d’un vieux démon ; “Aurora” a deux personnalités, elle peut prendre l’apparence d’une noble reine ou d’un ange ; d’autres poupées sont représentées en double (photos ci-dessous). Rafael adopte son nom d’artiste à l’occasion du lancement de BiDoll, en reprenant le patronyme de son arrière-grand-père, Nuri.
© Dolls magazine © Dolls magazine
En 2017, BiDoll produit sa première poupée en résine, commercialisée par le producteur et distributeur de BJD d’artistes JpopDolls. Elle annonce la ligne de poupées en résine Ego de 46 cm, dont la première se nomme “Graceful”, proposées avec un visage et un masque, reflétant deux personnalités. Rafael considère Ego comme une ligne de poupées mannequins, car elle possède leurs attributs : taille de la tête, des épaules, longueur des jambes et vêtements conçus par des stylistes.
Sur le plan technique, il y a une grande différence entre le travail avec la résine et avec la porcelaine. Rafael commente : “cette différence est visible dès le départ. Le prototype de la poupée de porcelaine n’a pas besoin d’être parfait car des modifications peuvent être apportées après le coulage, contrairement à la résine. Le travail sur le prototype en résine prend moins de temps, mais le processus complet est beaucoup plus long. La création du prototype d’une poupée en porcelaine dure six mois, la fabrication des moules deux mois, le coulage et la confection des vêtements et accessoires neuf mois.
Les créations de Rafael sont présentées dans plusieurs publications. Son travail a été récompensé par de nombreux prix, dont le Hellen Bullard award of excellence et le Industry choice award of excellence (prix d’excellence de la profession) du magazine Dolls. Rafael Nuri est membre de la PDMAG (Professional Doll Makers Art Guild).
Liudmila Dorofeeva
Fidèle à la tradition russe, l’artiste Liudmila Dorofeeva produit des poupées à la beauté nostalgique qui expriment l’âme de son pays, constituée d’une profusion de coutumes, de croyances et de légendes millénaires. BJD nobles et sensuelles richement vêtues, leur regard profond vous invite à la contemplation (photos ci-dessous). Dotées d’une coiffure élaborée et d’yeux en verre, leur bouche aux lèvres charnues révèle parfois une rangée de dents d’un blanc lumineux.
© LasDolls © LasDolls
Née à Koursk (Russie) en 1965, Liudmila Dorofeeva se passionne très tôt pour les arts plastiques. Elle s’oriente vers le métier de neurochirurgienne, qu’elle exerce pendant plusieurs années avant de réaliser un vieux rêve en se tournant vers la fabrication autodidacte de poupées à la fin des années 2000. Ses premiers modèles, statiques, sont en pâte Fimo, puis elle s’oriente vers les BJD en porcelaine. Elle se souvient avec émotion d’un de ces premiers modèles, une ballerine qu’elle conserve soigneusement. Elle s’installe en Franche-Comté près de Besançon en 2016, où elle gagne sa vie comme aide à domicile.
Sur le plan technique, tout commence par la création d’un modèle maître sculpté à la main, généralement en résine. C’est la sculpture du visage qui s’avère la plus longue et la plus délicate. Puis l’artiste réalise des moules en plâtre qu’elle fait sécher pendant plusieurs jours avant d’y couler de la porcelaine. Les poupées, d’une taille comprise entre 35 et 45 cm, font ensuite l’objet de trois niveaux de cuisson à des températures différentes allant jusqu’à 1300 °C. Elles comprennent de 20 à 28 articulations, le collage des charnières étant effectué avec du cuir. D’abord polies, elles sont recouvertes de glaçure puis peintes au pastel et protégées par du MSC. Les perruques en laine de chèvre, mohair ou cheveux naturels sont teintes. Pour confectionner à la main les vêtements de ses poupées, Liudmila utilise différentes techniques (couture, tricotage, dessin, feutrage de laine) et exploite de nombreuses matières naturelles : laine, soie, coton, cire, dentelle et brocart antiques, étole, ruban,… Les poupées sont livrées dans une boite personnalisée renforcée à l’abri de toutes détériorations, avec un certificat d’authenticité signé par l’artiste.
Ludmila peut réaliser des poupées sur demande à partir d’une photo, mais elle privilégie avant tout ses créations. Elle projette d’améliorer sa technique, d’être présente sur les salons internationaux tant en France qu’en Russie, d’être reconnue par les professionnels et de pouvoir vivre de ses créations. Fait remarquable : les prix de ses poupées sont ajustés et se maintiennent en dessous de 400 €.
© LasDolls © LasDolls
Pasha Setrova
Pasha Setrova est une artiste russe passionnée et pressée : “ça fait 12 ans que je fabrique des poupées d’art et des sculptures en technique mixte”, explique-t-elle, “et elles me passionnent toujours. J’aimerais qu’une imprimante 3D en temps réel soit connectée à mon cerveau. Parce que 24 heures par jour et deux mains ne suffisent pas. J’ai beaucoup de choses à montrer. J’ai beaucoup de choses à dire. Je n’ai plus le temps.” Retirée d’une carrière réussie de modèle depuis plusieurs années, elle est toujours dans la course. Mais aujourd’hui, c’est en modèle réduit, avec la populaire ligne PashaPasha de BJD mannequins. Avec des noms tels que Giddy Heights, Lollipop, Pink Panther ou Glam Rock, chacune de ses créations de mode hautement articulées exprime une curieuse dichotomie entre imagination et réalité (photos ci-dessous, de gauche à droite, OOAK en résine et technique mixte, “Saintly sinners V.1” et “Purple winter”).
© Pasha Setrova © Pasha Setrova
Née en Russie, Pasha Setrova voyage beaucoup durant son enfance. À l’âge de 16 ans, elle commence à travailler comme mannequin à Moscou, puis en France et en Italie. Elle écrit un roman qui rencontre le succès. Une période de crise (elle est schizophrène et épileptique) interrompt alors ses activités. Elle se repose à la maison et se lance dans la sculpture. Lors d’un stage d’une semaine de fabrication de poupées, elle réalise un modèle de Shakespeare en argile qu’elle vend rapidement. Une poupée de l’artiste Natalia Pobedina exposée dans une galerie attire son attention et déclenche chez elle une pulsion créatrice. “Je n’avais jamais vu une chose pareille et j’ai désiré l’acheter mais je n’en avais pas les moyens à l’époque”, confesse-t-elle, “cela m’a inspiré au point que j’ai voulu en fabriquer une moi-même.”
À l’âge de 24 ans, Pasha réalise des poupées en porcelaine pour une célèbre galerie russe d’art contemporain, dont la collection à succès “Beaten glamour” aux formes allongées. En 2011, elle décide de s’installer aux États-Unis, en partie pour vivre librement son homosexualité. Pendant plusieurs années, elle peine à trouver une galerie pour exposer ses poupées et se tourne vers le chant. Elle rencontre alors l’artiste Erika Vendett, qui deviendra sa femme. Cette dernière la convainc de revenir aux poupées. Pasha découvre enfin la galerie Artêria, qui vend rapidement ses créations.
Fin 2016, elle réalise sa première BJD. L’artiste en poupées Joshua David McKenney, fondateur de la ligne de poupées Pidgin, lui procure encouragements et conseils artistiques. Une année de travail sur divers prototypes aboutit à l’achèvement d’une BJD qui exprime pleinement l’esthétique de conception et la sensibilité de Pasha. Deux formes (Breath et Pulse) et quatre couleurs de résine (blanc os, soie ébène, lait et sang et sang bleu) sont initialement disponibles.
En 2018, Pasha remporte le prix artistique du magazine “Beautiful bizarre” avec la BJD “Morgentau” (“rosée du matin” en allemand, photo ci-dessous). Elle expose internationalement aux États-Unis, en Russie, au Japon, au Canada, en Lituanie, en Lettonie, en France et en Allemagne.
© Beautiful bizarre magazine
Comment Pasha perçoit-elle son œuvre ? “je veux que mes poupées soient sexy sans essayer de l’être”, commente-t-elle, “je veux que les gens y voient une âme -qu’elles sont en vie-, qu’ils réalisent combien j’y ai mis d’efforts et de réflexion, et qu’ils constatent d’une part que ce sont des poupées et d’autre part qu’elles sont un fragment de moi-même.”
Mais revenons aux poupées PashaPasha, véritables objets de contraste : éthérées en même temps que belles à couper le souffle, avec des visages et des corps si exagérément vivants qu’elles apparaissent quasiment humaines. Disponibles en deux tailles, originale et mini, et en multiples versions de corps, tous les modèles impeccablement habillés et coiffés sont mystérieux, fascinants et infiniment étranges. Ils sont également très difficiles à obtenir : depuis sa première BJD de 54 cm réalisée à New York en 2016, les poupées en édition limitée ou OOAK habillées ou nues sont régulièrement épuisées dans les minutes qui suivent l’annonce de leur disponibilité. Ceci a pour conséquence de décevoir ou de désespérer certains collectionneurs qui rêvent de posséder une de ces séduisantes sirènes, et accessoirement de frustrer l’artiste, qui ne parvient pas à répondre à la demande. “Je demande à chacun de garder à l’esprit que je ne suis pas une grande entreprise”, déclare-t-elle, “je suis une artiste certes aidée de quelques personnes merveilleuses, mais en fin de compte tout passe par mes propres mains et je n’en ai que deux. Je ne suis pas Mattel, aussi je ne peux pas pondre à la chaîne des centaines de milliers de poupées. Mais les gens doivent savoir qu’en mettant finalement la main sur une de mes poupées, ils verront le temps et le soin apportés à chacune d’entre elles. Ce sont des objets d’art.”
Pasha est ravie que l’usine retenue pour fabriquer ses poupées réussisse à concrétiser sa vision créatrice et les innovations qui font partie intégrante de sa conception. Elle travaille pendant un an à mettre au point les articulations, en particulier au niveau des épaules. “J’en suis très fière”, confie-t-elle, “pas des articulations elles-mêmes mais de ce qu’elles ont donné au monde des BJD. Quand j’ai réalisé mes premières articulations d’épaule, celles qui existaient alors étaient rudimentaires. J’ai été créditée d’un apport révolutionnaire, et cela représente beaucoup pour moi.” L’usine envoie tous les composants des poupées PashaPasha à l’atelier de l’artiste pour ponçage, montage des élastiques, suédage, assemblage, peinture, contrôle de qualité et conditionnement. De plus, elle collabore avec les concepteurs des perruques, des vêtements et des chaussures sur de nombreuses poupées.
Les BJD mini de 43 cm (photos ci-dessous) reçoivent un excellent accueil du public. “La poupée mini répond à une demande expresse de ma clientèle”, précise Pasha, “mais j’ai fini par l’aimer. Et bien qu’elle soit absolument identique à l’originale de 54 cm, elle me semble complètement différente juste à cause de sa taille. C’est plus facile de poser et de jouer avec la mini, de la stocker et de l’emporter, mais l’originale me semble plus artistique.”
© PashaPasha © PashaPasha
L’artiste a récemment lancé une première BJD PashaPasha masculine de 58 cm, baptisée XY. Une version mini de 47 cm est prévue, ainsi que plusieurs superbes poupées féminines en tailles originale et mini avec des articulations améliorées. Elle conclut : “j’ai de plus en plus d’idées, et pas assez de temps pour les matérialiser.” Décidément, Pasha est une artiste pressée.
Sources de la page
- Article “5 russian doll artists creating eerie, hyperrealistic handmade toys” du site Creators
- Page Michael Zajkov du site “The dollery”
- “Exclusive interview with Ekaterina and Elena Popovy, fashion dolls artists extraordinaire”, sur le site Huffpost
- Interview de Tatiana Baeva sur le site du magazine “Passport Moscow”
- Billet “Arts of a doll : a world of strange dolls Dima RV” sur le forum du site artinvestment.ru
- Billet “Art Dolls by Sasha Khudyakova to be Displayed in Moscow” sur le site Russia InfoCentre
- Page d’Ima Naroditskaya sur le site du NIADA
- Article Alexandra Koukinova dolls du blog “Seamstress of Avalon”
- Article Marina Bychkova’s enchanted dolls du site de la revue Beautiful Bizarre
- Article “Dramatic divas” de Stephanie Finnegan, dans le numéro d’octobre 2018 du magazine Dolls
- Article Costume drama : Anna Maryina dolls stun, inspire de Stephanie Finnegan, sur le site du magazine Dolls
- Article Living doll d’Anna Hardman, dans le numéro d’octobre 2011 du magazine électronique AIM (Artisans In Miniature)
- Article “Finding the magic : glowing from within” de Nataliya Lopusova-Tomskaya, dans le numéro d’automne 2015 du magazine “Art doll quarterly”
- Article Double image : Rafael Nuri designs porcelain BJDs that are doubly impressive de Stephanie Finnegan, sur le site du magazine Dolls
- Interview de Rafael Nuri, sur le site BJDcollectasy
- Interview The sculpted art dolls of Pasha Setrova de Christopher R. Inwood, sur le site du magazine “Beautiful Bizarre”
- Article “Runway ready, set, glow !” de Wil Peterson, Dolls, octobre 2021

J’ai passé un moment magique en regardant les œuvres de ces artistes.
C’est magnifique et enchanteur ! FÉLICITATIONS